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« indietro Feuille volante
Jean-Marie Gleize
La poésie, finalement, de quelque façon qu’elle s’habille, se présente, finit toujours par se présenter, comme une sur-langue, une pratique surdéterminée par la sublimation esthétisante, la préciosité formelle (parfois grimée minimaliste).
Il faut donc déplacer, se déplacer. Regarder du côté des usages contemporains et ordinaires de la langue. Ordinaire c’était aussi le mot de Flaubert dans cette lettre où il parlait à Louise Colet d’une «prose très prose». Je parle pour ma part de «prose en prose(s).»
La prose dont je parle serait antérieure, ou postérieure, ou parallèle (en tout cas extérieure) à la distinction de la prose et du vers.
Il s’agit de récuser le vers, l’exaltation du vers comme ultime refuge définitionnel de la poésie comme telle, radicalement spécifique et différente.
Il s’agit de récuser l’ensemble des dérivés, fonctionnant à l’intérieur de la dichotomie vers-prose: poème en prose (dérivé principal, hautement légitimé dans l’histoire «moderne» de la poésie), prose en poème, prose poétique (ou prose poétisée, par musicalisation et adjonction d’ingrédients à haute teneur métaphorique).
Lorsque je suggère qu’on puisse penser une «prose en prose(s)», ce qui tombe d’abord c’est la notion de «poème»: la prose dont je parle implique qu’il s’agit d’une pratique de l’écriture après le poème (une fois admis l’abandon de l’objet «achevé», clos, à haute définition formelle que notre tradition reconnaît et fétichise comme un «poème»). Fin des «recueils», donc.
Ce que j’appelle prose en prose(s) implique donc en effet «sortie» hors du champ de la poésie suggère donc l’idée de pratique post-poétique voire post-générique.
On voit qu’il s’agit également de dé-génériser la prose, de la décoller de sa liaison avec le genre roman (puisque «prose» signifie communément, dans le Village, prose romanesque).
Chacun sait qu’«il y a prose et prose», ce qui peut signifier d’abord qu’il y a prose romanesque (polymorphe, bien sûr) et prose(s) autre(s), au pluriel, celles dont je parle (c’est pourquoi j’écris «prose en prose(s)»).
Une pratique de l’écriture comme exposé, prose posée, et sans pose, exposante. Une «prose-déclic» (Dominique Fourcade): «J’étale les choses, je mets la vie à plat sans commentaire».
Tout ici, à réinventer. Prose(s) n’existe(nt) pas (encore). Est le nom extra ou postgénérique de nos pratiques expérimentales (dispositales, documentales…). De l’exercice d’une responsabilité formelle. Sans doute politique. Nioques…
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